Marie Rose Moro
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Psychiatre, Professeur des Universités
Directrice de la maison des adolescents de Solenn, Hôpital Cochin |

Ce sont les mots, mieux que les sols, qui nous portent et nous enracinent. Dans une période si peu hospitalière et tolérante à la diversité sociale, culturelle ou même historique, ces mots inspirés de Levinas pourraient nous aider à mieux se représenter ce que vivent ces adolescents, enfants de migrants, que nous sommes si prompts à caricaturer ou à stigmatiser. Ces adolescents, comme tous les adolescents, mais de manière plus aigue encore, sont en recherche de sens, d’identité complexe, d’histoire qui assume leurs multiples facettes comme tous les adolescents d’Europe, enfants de migrants, comme tous les adolescents du monde, fruits des migrations parentales et des mouvements de l’histoire, en particulier coloniale et économique. Et on le sait, les migrants sont maintenant si nombreux dans le monde du fait des crises, des guerres, des choix ou des nécessités qu’ils seront bientôt plus nombreux que ceux qui vivent et meurent sur le même sol. Il va donc falloir trouver des modalités de construction identitaires individuelles et collectives qui ne s’enracinent ni dans la terre, dans le sol historique mais dans tout ce qui se transporte, les mots, les souvenirs, les pensées, les corps, les livres… des identités éphémères mais consistantes qui nous permettent de nous sentir vivre, de penser et d’agir.
Rédigé par Marie Rose Moro le Mardi 28 Juillet 2009
Dans la rencontre, la peur disparaît et laisse place à l’échange comme on voit en ce moment à propos des enfants de familles sans papiers, enfants scolarisés qui risquent d’être expulsés dans tous nos pays européens. Les enfants, les familles, les associations se mobilisent pour résister. Elles connaissent les enfants, elles les rencontrent, elles se représentent ce qu’ils vivent et ce que vivent leurs familles alors, la peur fait place à la fraternité, c’est ce que nous ressentons tous les jours sur le terrain. Tel est donc l’enjeu, celui de la rencontre et non celui de la peur et des angoisses qui cherchent des objets pour se fixer… On ne dira jamais assez combien il faut se battre pour la mixité et contre les ghettos qui construisent des frontières visibles et invisibles entre les personnes et les citoyens, des hiérarchies aussi. Et aujourd’hui dans toute l’Europe, on voit des tentations autoritaires qui, au nom de la peur de l’autre, tendent à vouloir que chaque citoyen se transforme en policier et dénonce celui qui « ne devrait pas être là ». On oublie bien vite que nous aussi, nous avons été pays d’immigration, on oublie bien vite les principes éthiques de l’accueil des plus vulnérables, des exilés, de ceux qui, pour avoir encore quelques illusions, ont du partir. Les adolescents, enfants de migrants, sont le fruit de ces rêves, de ces utopies humaines. Ainsi, comme d’habitude, les positions à l’emporte-pièce des politiques ou de ceux qui veulent décider au nom de principes de réalités que l’on peut contester nous en apprennent plus sur leurs auteurs et leurs fantasmes que sur la réalité des choses. Pourtant, ils ne sont pas sans conséquences politiques comme la surenchère d’annonces publiques sur les politiques d’immigration le laisse entrevoir dans plusieurs pays d’Europe. A quel prix pour les enfants de migrants ? A quel prix pour notre société ?
Marie Rose Moro
Paris, 28 juillet 2009
Marie Rose Moro
Paris, 28 juillet 2009
Rédigé par Marie Rose Moro le Mardi 28 Juillet 2009
Marie Rose Moro
Maison des Adolescents - Hopital Cochin
Maison des Adolescents - Hopital Cochin
Rédigé par Marie Rose Moro le Samedi 15 Janvier 2000
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